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leblogdelaville
29 janvier 2007

Ecologie de la peur

LA
Au-delà de Blade Runner,
Los Angeles et l’imagination du désastre

Mike Davis
Ed. Allia, 2006

150 pp., 6,10 €.

Beyond Blade Runner Traduit de l'anglais par Arnaud Pouillot, constitue le chapitre 7 de Ecology of frear publié en 1998.

Une courte et incisive étude sur Los Angeles, épouvantable laboratoire urbain et social des mégalopoles futures…

Mike Davis s’était fait connaître il y a quelques année avec la publication d’une étude stupéfiante (City of quartz, La Découverte, 2000), où l’auteur analysait le devenir sécuritaire et la ségrégation sociale et raciale à l’oeuvre dans le déploiement sans fin de la métropole de Los Angeles. Ici, dans un texte court et incisif (en réalité un long chapitre tiré d’une vaste étude sur « l’écologie de la peur » - Ecology of fear, Metropolitan Books, 1998), l’essayiste, sur un mode très libre qui navigue entre la sociologie, l’urbanisme, la philosophie et la critique culturelle, s’intéresse de manière toujours plus aigue au devenir de LA. Rejetant l’imaginaire cinématographique de la ville, dont Blade Runner de Ridley Scott offre le paragon en nous décrivant une cité en proie au chaos social et à la violence, Mike Davis montre qu’au contraire, c’est bien plutôt la « bunkerisation » des couches ethniques et sociales de la société qui sont à l’origine du désastre politique et urbain de la ville des anges… Vidéosurveillance, ghettoïsation raciale, sécurité privée, guerre permanente de « basse intensité » sont les maîtres mots d’une étude vivante et brillante à lire comme un cauchemar au présent.

Blade Runner, le film de Ridley Scott, a imposé la vision futuriste et apocalyptique d’un Los Angeles dévasté, livré au chaos. Ce que montre Mike Davis dans cet essai, c’est que le visage futur de la ville, dont tous les éléments sont déjà en place, sera à la fois moins spectaculaire et, en un sens, beaucoup plus effrayant. Véritable laboratoire social et urbanistique, Los Angeles offre d’ores et déjà le modèle vers lequel tendent les mégapoles modernes : destruction de toute mixité sociale par cloisonnement strict des populations dans des quartiers réservés, certains laissés à l’abandon et à la domination des gangs, tandis que les couches les plus aisées se “bunkerisent” grâce à la généralisation de la vidéosurveillance et des milices de sécurité privées. La ville vit désormais dans un état perpétuel de “guerre sociale de faible intensité”, susceptible à tout moment d’éclater, comme lors des émeutes provoquées par le tabassage de Rodney King. À la fois sociologique, urbanistique et politique, illustré de photos saisissantes, l’essai de Mike Davis, qui s’appuie autant sur des statistiques précises que sur son expérience personnelle, au-delà du cas de Los Angeles, offre un portrait saisissant de l’Amérique contemporaine et de l’évolution qui menace les sociétés occidentales.

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